Dans sa chambre du Village olympique de Tokyo, Avalon Wasteneys porte fièrement un t-shirt d’Équipe Canada à ses premiers Jeux olympiques et un sourire éclatant illumine son visage. Elle ne peut s’empêcher de penser aux membres de sa famille qui l’ont précédée, soit sa mère et sa tante qui ont participé aux Jeux olympiques en aviron.
« Je pense qu’une chose intéressante à réaliser, pour moi, est qu’en participant à ces Jeux olympiques, je ne participe pas uniquement pour moi, mais j’ai l’impression de concourir pour ma mère et ma tante, et des personnes qui n’ont pas nécessairement obtenu le résultat ou la reconnaissance qu’elles souhaitaient. »
Avalon a de grands espoirs de monter sur le podium à Tokyo. L’équipage du huit féminin dont elle fait partie a remporté une médaille de bronze sur le circuit de la Coupe du monde en 2019, la dernière saison complète avant la pandémie.
Ce n’est pas exagéré de dire qu’Avalon est propulsée et possède une motivation supplémentaire aujourd’hui parce qu’elle a l’aviron dans le sang.
Sa tante Christine Clarke a participé à l’épreuve du huit féminin aux Jeux olympiques de Los Angeles en 1984 et a raté une médaille de peu, terminant quatrième.
Sa mère, Heather Clarke, a rencontré le père d’Avalon alors qu’ils faisaient tous deux partie du programme d’aviron à l’Université Queen’s. Aux Jeux olympiques de 1988 à Séoul, Heather a participé au quatre avec barreur féminin. Elle a atteint la finale et a terminé septième.
« Il est vrai que nous nous sommes parfois sentis négligés, a déclaré sa mère Heather, ajoutant : Je suis très touchée qu’Avalon soit motivée à représenter non seulement elle-même et sa génération, mais aussi ceux qui l’ont précédée. »
Ce qui est ironique, c’est que dans son enfance, Avalon n’a jamais voulu poser sa rame dans l’eau.
La famille était active et faisait beaucoup d’activités de plein air, mais ne vivait pas près d’un lac. Elle s’est concentrée sur d’autres sports comme le ski de fond et est devenue l’une des meilleures skieuses du pays dans sa catégorie d’âge. Cependant, quand songeait à aller à l’université, sa mère lui a suggéré l’aviron. Au départ, Avalon a refusé.
« C’était plus parce que ma mère voulait vraiment que j’essaie l’aviron. Donc, j’étais simplement une adolescente rebelle et je me suis dit, je ne ferai jamais ça parce que tu veux que je le fasse. »
L’histoire de Kai Langerfeld est similaire. Il n’allait pas suivre les traces de son père, du moins au début.
Le père de Langerfeld, York, a participé aux Jeux olympiques de 1976 à Montréal en quatre masculin.
Kai, qui participe à ses deuxièmes Jeux olympiques, fera équipe avec Conlin McCabe dans l’épreuve du deux de pointe masculin. Il a récemment partagé l’histoire de son parcours en aviron dans une entrevue animée par McCabe, son partenaire d’aviron.
Plus jeune, Kai a pratiqué presque tous les autres sports, sauf l’aviron.
Il a commencé à jouer au hockey sur glace à l’âge de trois ou quatre ans et a continué jusqu’à l’adolescence. Il était défenseur, tout comme son héros de la LNH, Scott Niedermayer, originaire de Cranbrook, en Colombie-Britannique, où il vivait à l’époque.
Quand son père a emmené Kai à une activité d’anciens de l’aviron alors qu’il avait 13 ou 14 ans, le père et le fils ont ramé ensemble.
« C’était une période de ma vie au cours de laquelle je ne considérais pas l’aviron. Je peux dire en toute honnêteté que je n’aimais vraiment pas ça du tout, je pensais que c’était un sport vraiment stupide. »
Cela a changé quand Kai a terminé ses études secondaires. Sa carrière de hockeyeur était terminée et il a commencé à travailler à Victoria. Un des entraîneurs de l’équipe universitaire d’aviron l’a vu s’entraîner dans le gymnase et l’a invité à tenter sa chance.
Kai a décidé d’essayer le sport à 22 ans, un départ plus tardif que la plupart des membres de l’équipe olympique.
Selon lui, son expérience sportive lui a offert une base qui lui a permis de progresser. Le fait de pouvoir suivre les traces de son père était aussi un aspect positif.
« Je pense que pour moi, personnellement, il n’y avait littéralement aucune pression d’être à la hauteur de quoi que ce soit. Je pense que c’est parce que (mon père) ne m’a jamais vraiment mis de pression. C’est un col bleu très travaillant qui est aussi très humble. Donc, il ne parle jamais vraiment de ses succès dans le sport, dans les affaires ou dans la vie. »
« Je vais vous corriger. Il ne suit pas vraiment mes traces, plaisante le père de Kai, York. Il a dépassé mes traces, de loin. »
Pour ce qui est d’Avalon, chaque fois que sa mère évoquait l’idée que parce qu’elle était grande et athlétique l’aviron serait le sport parfait pour elle, Avalon n’avait aucun intérêt à en parler.
Au lieu de cela, Avalon a continué à se concentrer sur le ski de fond et cherchait à obtenir une bourse pour aller à l’université en Alaska. En 2014 cependant, son entraîneur dont elle était très proche est décédé et, suite à ce choc, elle s’est mise à la recherche d’un nouveau défi.
C’est à ce moment-là qu’elle a finalement écouté les conseils de sa mère qui lui disait qu’avec son profil corporel et sa capacité aérobique, elle était faite pour l’aviron. Elle a essayé l’aviron à l’Université de Victoria et n’a jamais regardé en arrière.
« J’ai réalisé que ma mère avait probablement raison. Finalement, j’ai succombé et je suis tombée en amour avec l’aviron. »
L’une des personnes qu’Avalon a rencontrées à ses débuts à l’Université de Victoria est York Langerfeld, qui aidait à entraîner l’équipe des recrues.
« Un après-midi, Avalon et une autre jeune femme ont fait une sortie en deux de pointe. Elles propulsaient très bien le bateau. Alors, je les ai surnommées mon ‘deux de pointe de Tokyo’ ».
Six ans plus tard, la prédication de Langerfeld s’est concrétisée. Avalon est à Tokyo, même si York n’avait pas tout à fait la bonne épreuve.
Un autre catalyseur de la carrière d’aviron d’Avalon est survenu quand elle a reçu le financement du Camp des recrues RBC, un programme qui aide à développer les futurs talents olympiques.
Au fil de son développement dans le sport, Avalon a réalisé à quel point elle en savait peu sur l’aviron.
« C’est hilarant, parce que, de toute évidence, tant de personnes dans ma famille ont pratiqué l’aviron, mais j’étais toujours comme, Oh, c’est tellement stupide. Je n’ai aucun intérêt à faire ça. Vous êtes assis dans un bateau et vous ramez avec acharnement. Je n’avais pas réalisé à quel point l’aviron requiert de la beauté, des compétences et de la finesse. »
Avalon s’intéresse maintenant davantage à son histoire familiale unique.
« C’est plutôt gênant, mais je pense que je n’avais même jamais regardé les courses (de ma mère ou de ma tante). J’ai regardé leurs médailles remportées dans le cadre de différentes régates internationales à quelques reprises au fil des ans. Je pensais que c’était plutôt cool. Cependant je n’ai jamais vraiment montré assez d’intérêt pour regarder au-delà de ce qui se trouvait sous mes yeux. »
Sa mère et sa tante ne lui ont pas vraiment donné de conseils particuliers avant Tokyo, lui disant qu’elles préféreraient qu’elle trace sa propre voie. « Je suis tellement inspirée par elles en tout temps », dit Avalon.
« Cela me donne des frissons. C’est tellement gentil. Le fait que le dimanche 25 juillet soit le jour de mon anniversaire est très important pour elle, dit sa mère Heather. Elle n’arrête pas de dire, maman, je concours le jour de ton anniversaire. »
À Tokyo, Avalon trouve intéressant que ses premiers Jeux soient en cette période sans précédent. Il y a des barrières en plexiglas là où ils mangent dans le Village, une des nombreuses mesures strictes en place pour assurer la sécurité de toutes les personnes présentes pendant la pandémie. Leurs mouvements sont limités et le seul endroit où ils peuvent vraiment aller est le site d’aviron.
« Je pense presque que c’est en quelque sorte un cadeau que mes premiers Jeux olympiques se déroulent alors qu’il ne se passe absolument rien. Il n’y a rien d’autre sur quoi se concentrer à part nous-mêmes. Parce qu’il n’y a pas de distractions en ce moment. »
Bien que l’aviron soit arrivé tard dans sa vie, Avalon pense qu’elle ne serait pas à Tokyo si elle n’avait pas fait les choses de cette façon.
« Je pense que c’était exactement le parcours qui m’était destiné. Je n’ai aucun regret. »
Avalon pense qu’il y a un message dans son histoire pour les autres.
Chacun a son propre parcours. Pour certains, commencer tôt à ramer est la voie à suivre. Essayer divers sports, y compris l’aviron, est aussi très important.
« Parfois, vos parents ont raison, et ils savent peut-être des choses que vous ne savez pas encore. Cela dit, soyez assurément patients et ne vous sentez pas obligés de vous lancer dans quelque chose simplement parce que quelqu’un d’autre pense que vous devriez le faire. »
Pour plus de renseignements sur la régate des Jeux de Tokyo 2020 et les 10 embarcations canadiennes, veuillez cliquer ici.
Par Teddy Katz